Mon cours d'économie idéal: 8 brèves leçons pour tout comprendre by Yanis Varoufakis

Mon cours d'économie idéal: 8 brèves leçons pour tout comprendre by Yanis Varoufakis

Auteur:Yanis Varoufakis [Varoufakis, Yanis]
La langue: fra
Format: epub
Tags: economie, essai
ISBN: 9782081393592
Google: d1jlDAAAQBAJ
Éditeur: Flammarion
Publié: 2016-08-29T22:00:00+00:00


Les crises du profit : la résistance des sociétés humaines de marché à… Matrix

Dans le chapitre précédent, je t'ai parlé de la « ligne du temps » et de la manière dont les banquiers la franchissent pour ramener de la valeur future dans le présent, contractant ainsi une grande dette qui constitue, dans les sociétés de marché, la condition préalable de grands excédents, d'une technologie avancée, d'immenses richesses, mais aussi d'énormes inégalités et inévitablement de crises, puisque les banquiers vont d'ordinaire « trop loin » et arrachent au futur des valeurs de plus en plus grandes que le présent finit tôt ou tard par ne plus pouvoir rembourser.

Dans le présent chapitre, nous avons vu que les crises n'avaient pas seulement pour cause la démesure des banquiers et qu'elles étaient aussi imputables à la tendance qu'ont les entreprises à mécaniser le processus de production. Dans un premier temps, cette mécanisation imprime un élan impressionnant aux sociétés de marché. Lorsque l'industriel, qui veut réduire les coûts et augmenter la production, commande une nouvelle machine à vapeur (au XIXe siècle) ou un nouveau système robotique (aujourd'hui), il initie sans le vouloir une réaction en chaîne vertueuse.

Afin d'exécuter la commande, l'entreprise qui fabrique les machines recrute des ouvriers qui peuvent grâce à leur revenu acheter un logement, une voiture, ou aller au restaurant, etc. Les promoteurs immobiliers, les acteurs du secteur automobile et les restaurateurs voient leurs recettes augmenter. Ils procèdent eux aussi à des investissements. Et ainsi de suite. Le progrès technique a sans doute supprimé des emplois, comme lorsque la voiture a remplacé le cheval (en faisant disparaître les métiers de maréchal-ferrant, de palefrenier et de charretier par exemple) ; mais il en a créé beaucoup plus dans de nouveaux secteurs d'activité (construction de routes, stations-service, industrie automobile). Il s'agit du cercle vertueux qu'induit la combinaison de la concurrence entre les entreprises et du progrès technique qui engendre de nouvelles machines merveilleuses.

Mais dès que se développe ce cercle vertueux, la semence de la crise se met à germer en son sein même. En d'autres termes, les machines inventées par le génie humain produisent des biens dont nous avons besoin, créant en même temps davantage d'emplois, le spectre de la crise commence tout doucement à planer sur nos sociétés. Tu vois, c'est que la mécanisation progressive du processus de production rapproche nos sociétés de Matrix – d'une situation où les machines fabriquent, non pas seulement des produits, mais aussi d'autres machines. Toutes seules, sans avoir besoin de nous, les hommes !

Tu te rappelles ce que nous avons dit de « l'économie » de Matrix : qu'elle fait des merveilles, qu'elle construit de superbes cités, mais sans pouvoir produire de valeur d'échange. Plus la production se mécanise, autrement dit plus la société de marché se rapproche du modèle de Matrix, plus les valeurs d'échange tendent vers zéro. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle l'iPad que tu as acheté cette année était nettement moins cher que celui que je t'avais offert il y a cinq



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